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Sud - Ouest, France
Des mots-Des Images en tout sens

dimanche 29 juillet 2012

Un Rien Contre L'Oubli - Recueil

Le livre Un Rien Contre L\'Oubli


Nouvelle bannière 2014

L'Alfama





L'Alfama  - Tram 28 - Lisbonne

Souviens-Toi de l'Eté Qui Vient


Souviens-toi de l’Été qui vient

Un Rien, contre l’Oubli



Pièce en un acte








La scène représente la pièce principale d’un lieu à vivre. Très peu de meubles sont entreposés là de telle sorte qu’il est difficile de dire si le lieu vient d’être emménagé, non encore installé ou prêt à être quitté. Les étagères sont vides. Une cantine de métal traine au milieu du plateau.

Est-elle là, prête pour un départ ou attend-elle d’être rangée ?



Sur l’écran blanc au fond de la scène passeront des images du temps passé et présent.



Les premières images sur l’écran sont celles d’une foule en plein air. Ce sont des extraits du film de Woodstock. Jimmy Hendrix explose sur l’écran entamant un de ses morceaux de clôture du festival par l’hymne Américain « Star-Spangled Banner ».

La caméra glisse sur le public du festival comme le surfer sur une vague, laissant peu à peu place à l’océan qui se tague de reflets vert-clair chevauchés par des rubans blancs qui volent au vent. Le morceau de musique se prolonge.



           Assise à même le sol face au quatrième mur, face au public, une femme travaille sur des rouleaux de  maillechort. Quelques pinces à couper, d’autres utilisées afin de courber le métal sont autour d’elle. Elle mesure, coupe donne des formes. Elle enfile des perles sur le fil de métal. Elle sculpte des sphères et des triangles en volume en y intégrant des perles de couleurs.



           Dans son dos, un homme entre, la regarde puis s’échappe dans le fond de la scène vers l’écran et revient vers elle. Il hésite.

           Rapidement comme malgré lui, plus proche d’elle,

           Lui : Je ne vais pas rester !

          Elle lève le regard vers lui essaie de dire un mot mais déçue elle reprend son travail.

          Sombre elle attend qu’il parle encore.



          Ils restent ainsi longtemps à écouter le vent se remplir du murmure de la vague. Elle raconte avec une infinie tendresse les méandres de leur âme.



La marée est montante et la vague s’affirme avec certitude elle grignote puis avale goulument chacun des grains de sable sur son passage.



Une voix s’élève, la sienne à lui, alors que l’aube se dresse avec la marée qui s’ourle maintenant de ses éclats blancs sur l’horizon les courbes douces et roses du Banc d’Arguin sur l’écran.



         Elle : face au quatrième mur, assise à même le sol les yeux parfois baissés en un repli intérieur sur son silence et sa tristesse, face aux objets épars à ses pieds. Comme si elle percevait sa voix à lui, son regard se lève comme porté sur l’océan et l’horizon qui défile dans son dos.



Ta voix se glisse entre les vagues

Et me ramène vers le rivage

Je suis le Cormoran

Qui veille sur ta couche

En effleurant ta bouche



Quand tu dors ma douceur

Je m’élève en langueur

Au delà de la dune

Je joue avec le vent



Le temps de ton sommeil

Je protège tes rêves,

Ma si belle

Quand tu t’éveilles

Ta voix de nouveau en écho

Joue dans le creux des vagues



Ta voix dans sa douceur

Me guide toujours vers toi

Ne t’en fais pas ma douce

Loin ou près

Je veille toujours sur toi



Sur l’écran, dans le désordre temporel comme joue la mémoire des images des combats en Irak des scènes de cour d’école des scènes d’émeute et leurs représailles en Syrie.



            Elle enfile de nouveau ses perles avec une concentration intense. Elle sent sa présence si proche mais s’empêche de le regarder tendue inquiète de ce que pourrait signifier son regard à elle posé sur lui. Inquiète de provoquer quelque chose en lui d’irrémédiable.

             Puis le regard droit devant elle comme si elle le portait sur l’horizon marin elle lance comme pour elle-même

           Elle : C’est la deuxième fois en douze ans que tu me parles ainsi. Ca ne te ressemble pas. En tous cas pas avec moi. Et comme la dernière fois, c’est à cause d’elle.



           Lui surpris se redresse le visage perdu le corps à l’écoute.



           Elle poursuit : C’est à cause d’elle, je le sais ! Elle t’a jeté si fort te décrivant avec vulgarité je me souviens : Tu étais blessé en colère révolté.


Et puis sans doute comme d’habitude elle te rappelle et tu cours. Je sais que tu vas vers elle comme la dernière fois. Quand cesseras-tu de vouloir lui prouver que tu es quelqu’un de bien. Ne comprends-tu pas qu’elle joue avec toi ? Seulement pour se rassurer elle sans aucune place pour toi !




            Lui, se rapprochant doucement d’elle tente de comprendre ses gestes comme s’il les découvrait pour la première fois. Il cherche à la prendre et l’enlacer dans ses bras voulant se blottir dans son dos mais ne le peut pas. Il s’en éloigne soudain. Il est à quelques pas d’elle sentant son souffle et y étant sensible. Il s’approche de nouveau comme ces demoiselles, libellules bleues, cherchent les éclaboussures au bord du cours d’eau, avec douceur, le regard tendu vers elle. Il se retient et repart encore.



           Elle : Les yeux sur son ouvrage puis sur l’horizon de nouveau :

            Il y a des gens qui ont besoin de nous voir laid. Qu’est-ce-que cela peut faire ? Ce qui compte c’est d’être entendu par ceux que l’on aime. Les autres sont sans importance.

             Un temps

            Je croyais que tu m’aimais…

               Elle se tait les yeux baissés de nouveau sur son travail. Le corps triste.



Apparaissent sur l’écran des extraits d’un des derniers ballets de Béjart « Zarathoustra, le chant de la Danse».




                   Lui : Tu m’as dit que tu étais guérie. Je ne veux plus avoir peur.



                 Elle : le coupe avec fermeté

                 Arrête !



                    Il la regarde le visage tendu. Il est rare qu’elle parle ainsi.



                   Puis avec une extrême douceur elle dit :

                    Ne fais pas cela…

                   Elle poursuit :

                    Cela n’a rien à voir avec moi !

                    Tu ressembles juste à l’adolescent qui cherche la reconnaissance de sa mère même si elle le torture encore et encore.




Sur l’écran en fond de scène des images de civiles étendus dans des rues embrasées. Des gens courent alors qu’une voix grave de femme s’élève au dessus des images. Sa voix à elle.




                Lui s’éloigne de nouveau lentement le regard tendu vers elle comme malgré lui. Il se tait.



De temps à autres comme en image subliminale à rythme plus ou moins régulier une vieille femme apparait sur l’écran. Elle marche légèrement courbée, malhabile, dans les allées d’un cimetière un bouquet de violettes à la main. D’autres fleurs seront dans ses mains en fonction des saisons. Sa tenue vestimentaire sera changeante elle aussi afin de représenter la répétition et l’écoulement du temps tout au long de la représentation.



Le trouveront-ils un jour

Ce bel équilibre nuit-jour ?



Dis-leur toi,

Que ce temps n'est pas seulement

Celui d'un jour

A l'heure du solstice.



Que ce n'est pas le seul privilège

D'un instant



Dis-leur toi

Que tu ne comprends pas leurs peurs,

Que c’est ainsi que leur relation se tend

Et ressemble parfois

A la lutte des débuts

Entre le cheval et la cavalière



Mais que parce que c’est elle,



Et que parce que c'est lui



Dis-leur encore

Que toi tu le sais

Parce que c'est lui

Et qu'il s'agit d'elle



Qu’ils sont arrivés là

Où les souffles se posent



                         Lui : J’ai peur.



Sur l’écran naissent des défilés politiques mêlés à des images de Fukushima mais aussi des images d’il y a une dizaine d’années allant de l’écroulement des tours du World Trade Center, des tremblements de terre à Bam et à Haïti des scènes de défilés de premier mai à travers le monde des images de trente et un décembre à travers le monde avec en fond sonore des extraits de Stan Getz « The Lost Session »

                   Je voudrais que nos échanges durent toujours






                   Elle : En ne restant pas !



                   Lui : J’ai vu ma mère marcher en silence le long de cette allée de cèdre pour rejoindre mon père sous la pierre et déposer chaque jour un bouquet de violettes. Je ne veux pas que tu ressembles à ma mère. Le temps a passé et je l’ai vue contrainte et fatiguée. Les premières fois devant la pierre, elle lui parlait de leur amour et de leur vie quand il marchait à ses côtés.



Richard Galliano joue Piazzolla puis Dylan chante « Blow in The Wind » sur des images de changement d’investiture présidentielle allant de Chirac à Hollande.



                  Lui regarde l’écran défilé quand il s’éloigne d’elle et se tait puis se tourne de nouveau vers elle. Son regard suit la courbe de ses épaules et son cou et ses mains qui s’activent.



                    Il reprend :

                    Elle lui racontait ses jours après son départ. Elle y allait plusieurs fois par semaine. Puis ses visites se sont estompées. Aujourd’hui son pas est lent et contraint Elle n’y va plus qu’avec moi, une fois par an. Face à la pierre elle ne sait plus pourquoi elle vient elle ne sait plus la couleur de ses yeux. C’est comme si elle ne savait plus ce qu’elle éprouve. Elle est juste là sans âme faisant le trajet comme d’autre vont acheter leur pain c’est une forme de nécessité sans objet.

Je ne veux pas que tu connaisses ce trajet là je ne veux pas t’imposer cela.



Une voix, la sienne à lui s’étend au dessus de l’horizon au dessus de Dylan jouant «Knockin’ on Heaven’s Door»

« Je voudrais que tu retrouves nos pas au milieu de chacune des pages que j’ai pu t’écrire. Tu n’auras qu’à les relire. Je sais que tu fais ça si bien et tu sauras qui je suis et combien je ne t’ai pas oubliée.

Tu seras toujours ce regard fougère et tous ces mots et tous ces silences partagés loin ou près je suis toujours avec toi au fond de mes poches, précieuse et fragile indispensable. »



                Elle, comme percevant sa voix à lui, regarde l’horizon comme elle s’appuierait sur la mer. Elle essuie ce qu’elle voudrait être la brume humide à l’orée de ses paupières des reflets brillent dans ses prunelles des reflets d’océans et de douceur.



              Lui reprend :


              Tu te tais. Au fond de toi, tu sais ces choses là. Continue à regarder la mer ne te retourne pas je suis le grain de sable je suis la vague on n’est sans doute pas assez forts pour ce monde là qui grouille au dehors.



Pina Bausch danse sur l’écran accompagnant son ballet « Orphée et Eurydice», images fondues avec des images d’Adjani dans la Dame aux Camélia. Puis apparait la vieille femme se balance dans un fauteuil à bascule sur une véranda donnant sur l’océan.



               Elle, après un silence comme prise par l’océan dans son dos derrière ses mots au dessus des vagues :

               Tu as peur que je t’oublie comme ta mère aurait - selon toi - oublié ton père. Tu sais tant de choses et pourtant tu n’as rien compris.

               Au début ta mère avait besoin d’aller chaque jour voir la pierre où repose ton père parce que la séparation était violente pour elle. Elle a peu à peu cessé mais n’a jamais oublié. Elle a seulement compris que ton père était toujours présent vivant au fond d’elle rien que pour elle.



Naissent des images du World Trade Center 2012 suivi de celles de Haïti où les populations sont toujours dans des camps sous des tentes des services humanitaires alors que Fukushima avance lentement dans sa décontamination inutile et fragile.



                  Lui semble happé par l’écran mais son dos se tend à chacun de ses mots à elle.

                    Elle poursuit :

                    Elle a su qu’il lui suffisait de regarder en elle pour le retrouver vivre chacun des instants précieux passés ensemble afin de les laisser vivre encore intensément. Elle n’avait pas besoin que les autres sachent encore moins toi qui la juges de façon si amère à chacun de ses pas vers lui.



                    Il la regarde alors que l’océan envahit de nouveau l’écran dans des couleurs dorées et vertes. Seul le chant des vagues avec force envahissent l’écran.



                      Et c’est justement parce qu’ils ont vécu toutes ses choses secrètes ensemble qu’il est toujours vivant en elle. Tu voudrais partir afin d’éviter de souffrir afin d’éviter que je te vois vieillir ou que la vie m’abime. Mais c’est ainsi que tu vas me perdre et que nous disparaitrons trop vite de la terre.



Sa voix à lui derrière l’écran

« Ne t’en fais pas ma douceur, nos mains resteront liées quelle que soit la saison quoi qu’en disent les vents. Malgré le monde et toutes ses déraisons les vents pour nous ne seront jamais contraires. Ne t’en fais pas toujours on s’aimera, on tiendra.

Viens, allons vers l’ombre de la dune. Là où le ciel se peint en rose entre nuages et banc de sable. Viens donne-moi ta main. Ne me lâche pas. Dans mes bras tu pourras dormir. Je suis juste là ma douceur. Il y aura d’autres matins ou nous ne connaitrons pas les chagrins. »



                Comme s’il entendait et reconnaissait sa voix, il se tourne vers elle plus intensément s’approche si près qu’il pourrait l’effleurer et pour la première fois il l’aide. Il prend dans ses mains les figures finies sphères et triangles et les lui tend. En silence



Mahalia Jackson prend le relai avec « Trouble of the World » et enveloppe tout l’espace de sa puissance.




                   Elle les prend de ses mains à son tour. Elle lève les yeux vers lui intensément pour la première fois elle lui sourit.

                   Elle les accroche sur les bases de métal qu’elle vient de mettre en place afin d’en vérifier l’équilibre. Un mobile a pris forme et se meut dans l’espace ayant trouvé son équilibre.



                     La lumière baisse doucement dans la salle. Seul l’océan en fond d’écran éclaire le couchant en feu ocre et vert gris bleu.



                      Lui se dirige vers la cantine.

                      Elle : Je n’ai pas peur d’être seule…


                       Et je n’ai pas peur de mourir !




                       Il se retourne vers elle interrogatif puis il lui sourit.



                       L’idée d’être séparée de toi pour toujours m’est tout simplement insupportable.



                       Un temps. Ils se regardent intensément en silence.



                       Je t’aime.



                        Il soutient son regard encore un peu puis se penche vers la cantine lentement. Il ouvre le couvercle et la vide de ses livres avec délicatesse. Il les aligne consciencieusement dans les étagères jusque là restées vides.



Puis vient la nuit et peu à peu le silence des vagues même.



lundi 16 juillet 2012

Narcisse




Nouaillé-Maupertuis


Les pierres ne se perdent pas
Le petit poucet le savait bien

vendredi 13 juillet 2012

Les Vents Tièdes racontent


Les douceurs de la lumière 
Qui se pose  ...




 La Dame de Nazaré